L'Énergie créative en partage
Cédric Villani : En parlant de Capisco, de quoi s’agit-il ?
Patrice Moullet : Cette exposition s’inscrit dans la continuité des activités de Musaïques, qui rapprochent les dimensions artistiques, technologiques et sociales. Une première exposition a été organisée au Grand Palais en 1989. Plus récemment, en 2012, nous avons produit un spectacle, Fractales, également à la Maison des métallos. Capisco, c’est un peu les deux à la fois : une exposition de douze sculptures sonores et des performances réalisées par des artistes et des jeunes en situation de handicap.
CV : Qu’est-ce qui a changé durant ces vingt-cinq années ?
PM : Une rencontre, en réalité un choc, qui s’est produit en 2003. Des jeunes d’un institut médico-éducatif se mettent à jouer sur un Omni, instrument électroacoustique exposé à des fins artistiques. Et ils font un malheur ! S’engage alors une bataille pour mettre cet instrument à la disposition des enfants handicapés. En 2009, la Maison des métallos nous ouvre ses portes et accueille les ateliers Omni Enfance Handicap. L’atelier est réussi quand les jeunes atteignent un degré de concentration qui leur permet de trouver au fond d’eux-mêmes l’énergie qui prélude à la création.
CV : Quels souvenirs les plus marquants gardes-tu de ces années récentes ?
PM : Fractales, très certaine-ment, qui récompensait le travail réalisé avec le Centre Raphaël et la MAS Alain-Raoul Mossé. Pour la première fois, devant un « vrai » public, il nous permettait de montrer que la fusion des ateliers et de mes travaux représentait une performance artistique à part entière. Capisco permettra de retracer tout le travail qui a été fait autour de Fractales. Et les performances qui y seront données apporteront une nouvelle fois la preuve qu’en matière artistique, la frontière entre artistes valides et non valides n’a pas de sens.
CV : Qui a cru dans ton projet ?
Ils sont nombreux, depuis l’origine et encore aujourd’hui : le ministère de la Culture ; Gérard de Senneville, le directeur général de l’Epad qui abrite mon atelier à la Défense ; la Maison des métallos bien sûr ; la Mairie de Paris et Véronique Dubarry, adjointe au Maire ; la Fondation de France, l’OSE, la Fondation RATP, la Fondation Crédit coopératif, Entreprendre pour aider.
CV : Quels sont tes projets ?
PM : Un projet, essentiellement, qui portera aussi le nom de Capisco (Centre artistique parisien d’innovation sociale et culturelle Omni). Il s’agit d’installer une salle multi-sensorielle, avec trois instruments, qui proposera des programmes d’initiation à la création sonore à tous les publics, à des jeunes autistes et polyhandicapés et à des scolaires.
PM : Cédric, c’est moi qui te pose la dernière question. Q’est-ce qui t’a conduit à t’engager auprès de Musaïques ?
CV : Comme tu le sais, le projet m’a tout de suite séduit pour le rapprochement qu’il permet entre la technique, l’art et la société et pour l’alliance des qualités de créativité débridée et de rigueur de planification qu’il requiert. En veillant à réussir le bon dosage, en lui donnant la publicité qu’il mérite, en l’aidant à devenir pérenne, alors j’aurai fait une œuvre utile.
(décembre 2013)
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Capisco
Compositeur visionnaire, bricoleur de génie, Patrice Moullet est un homme profondément généreux : il invente des instruments de musique d’un nouveau type, accessibles à tous, pour partager sa passion du son. Ces douze instruments sont autant des œuvres sculpturales que des pépites de haute technologie qui enferment des sons musicaux que chacun peut faire entendre dans cette exposition ludique, sonore et visuelle sans aucune connaissance préalable, autant des machines sophistiquées que des objets ludiques et joyeux qui ne demandent qu’à être touchés.